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« La partie camerounaise doit faire preuve de plus d’ingéniosité pour capter les opportunités que lui offre son partenariat avec la Chine », Brice Merlin Mbessa Nya

Brice Merlin Mbessa Nya est un doctorant en Histoire option Relations Internationales à l’Université de Yaoundé I au Cameroun. Ses travaux de recherche ont pour point focal la coopération Sud-Sud et s’intéresse aux rapports Afrique-Chine au sein du Forum sur la Coopération sino-africaine (FOCAC). Récemment, il accordé une interview exclusive à l’Actu Chine-Cameroun, donnant son point de vue sur la coopération sino-camerounaise et son avenir.

1- Depuis le 26 mars 1971, la République populaire de Chine et la République du Cameroun sont liées par des relations bilatérales dont les retombées sont aujourd’hui bénéfiques pour le Cameroun et positionnent surtout la Chine, puissance émergente sur la scène africaine. Quel est votre regard de cette coopération, 54 ans après ?

Le partenariat sino-camerounais qui a 54 ans d’existence ce 26 mars 2025 peut être qualifié à juste titre de pragmatique et d’utilitaire. En effet, avec l’établissement des relations diplomatiques en date du 26 mars 1971, les deux nations se sont soutenues mutuellement de manière constante et indéfectible afin de préserver leurs intérêts communs ainsi que l’équité et la justice internationales. Si l’implication de la Chine dans tous les secteurs de la vie nationale pour l’émergence du Cameroun n’est plus à démontrer, le déséquilibre dans la structure commerciale entre les deux pays, le transfert de technologie tant vanté par la Chine, la sous-exploitation de la main-d’œuvre locale lors de la réalisation des grands projets sont quelques insuffisances à corriger pour rendre leur coopération plus efficiente.

2- Depuis plus d’une décennie, cette coopération est portée par l’initiative « la  Ceinture et la Route » et en septembre 2024 à Beijing lors du Sommet de Forum sur la Coopération Sino-Africaine (FOCAC) le président chinois Xi Jinping et son homologue camerounais l’ont élevée au rang de partenariat stratégique global. Comment comprendre cette progression ?

Elle trouve son sens dans le degré et la profondeur des liens multiformes qui impulsent à chaque fois un nouveau souffle à ce partenariat. Ainsi, les adjectifs qualificatifs “stratégique”, “global” indiquent à la fois un niveau plus élevé de relations politiques qui nécessitent une coordination et une coopération sino-camerounaise dans les affaires internationales d’une part, et, d’autre part, une connotation symbolique suscitant des attentes plus élevées dans les partenariats. Ce qui jouera en faveur de l’agenda géostratégico-économique de Pékin en Afrique certes, mais aussi camerounais et, dans une large mesure des autres pays africains qui veulent définir le rôle de leur continent dans l’ordre mondial émergent.

3- Le 5 septembre 2024, le président Xi Jinping a annoncé dans son discours d’ouverture du Sommet de Beijing du FOCA qu’au cours des trois prochaines années, la Chine serait disposée à travailler avec l’Afrique pour mettre en œuvre les dix actions de partenariat pour la coopération sino-africaine, afin de faire progresser la modernisation, d’approfondir la coopération sino-africaine et de diriger la modernisation du Sud global. Dans quelle mesure pensez-vous que cela puisse inspirer les pays africains en général et le Cameroun en particulier dans l’exploration d’une voie de modernisation adaptée à ses propres réalités ?

Les progrès économiques de la Chine depuis le début de sa réforme et de son ouverture en 1978, ont donné de l’espoir à tous les pays en développement dont le Cameroun en fait partie. En 2021, la Chine a sorti près de 800 millions de personnes de la pauvreté. Elle a réalisé d’importantes prouesses dans les secteurs agricole, technologique, automobile, du e-commerce, du cyberespace etc. qui ont contribué à la hisser au rang de deuxième puissance mondiale. Alors, si la Chine a pu le faire, les nations africaines le peuvent également. En attendant la mise sur pied de la plateforme sino-africaine d’échanges d’expérience sur la gouvernance qui a pour but de soutenir la création d’un réseau Chine-Afrique de connaissances, il s’agira pour le Cameroun de continuer à capter le savoir-faire chinois dans les domaines sus-évoqués (la liste étant loin d’être exhaustive) à travers ses étudiants boursiers, ses fonctionnaires ayant bénéficié des programmes de renforcement de capacités professionnelles et ses techniciens encadrés, qui se sont familiarisés aux normes et pratiques chinoises par le biais de l’apprentissage dans le tas. Celui-ci est une source importante de transmission du savoir souvent négligée alors qu’il permet au final à ses citoyens de s’adapter aux réalités locales. Il permet aussi à coup sûr au gouvernement camerounais de poursuivre sereinement sa Stratégie Nationale de Développement qui arrive à échéance dans cinq (5) ans.

4- Ces dernières années, les formes d’échanges et de coopération entre la Chine et le Cameroun se sont diversifiées. La coopération et les échanges de plus en plus approfondis ont permis de renforcer la compréhension mutuelle et d’approfondir l’amitié entre les peuples chinois et camerounais. Comment entrevoyez-vous l’avenir de la coopération Chine-Cameroun ?

Les décideurs de l’axe Yaoundé-Pékin depuis plus d’un demi-siècle, grâce à leurs convergences de point de vue sur différentes affaires bilatérales, régionales et internationales s’attellent à tracer la voie que devront suivre leurs peuples chinois et camerounais. Cette dernière repose sur certains principes tels que le respect mutuel. Donc, il n’est pas irréaliste de penser que cette coopération aura de beaux jours devant elle. Toutefois, la partie camerounaise doit faire preuve de plus d’ingéniosité pour pouvoir pleinement tirer parti des opportunités que lui offre son partenariat avec la Chine.

Propos recueillis par Gérard N.

 

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